L’étau du JNIM se resserre sur le Mali

Le cœur du Sahel tremble de nouveau. Ce 28 octobre, un convoi de transport d’hydrocarbures a été pris pour cible non loin de Bamako, sur la RN24. Une attaque d’une précision redoutable, menée par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM), branche régionale d’al-Qaïda dirigée par Iyad Ag Ghaly. Une nouvelle démonstration de force du mouvement jihadiste, à seulement quelques dizaines de kilomètres de la capitale malienne.
En effet, selon des sources locales cités par les médias, l’opération a été menée avec un savoir-faire militaire impressionnant. Les jihadistes n’ont incendié que les premiers et les derniers camions du convoi, immobilisant ainsi les quarante autres citernes remplies d’essence et de gasoil. Une tactique désormais classique : frapper juste assez pour bloquer, sans détruire le butin. Les images diffusées sur les canaux de propagande montrent de lourdes volutes de fumée noire s’élevant d’un paysage boisé, à une cinquantaine de kilomètres de Kati, la ville-garnison symbole du pouvoir du général Assimi Goïta.
Derrière cette attaque, ce n’est pas seulement une opération de pillage : c’est un message. Le JNIM démontre qu’il peut frapper dans le cœur économique du pays, sur les routes vitales reliant le sud-ouest à Bamako. La guerre n’est plus cantonnée aux confins désertiques du nord ou du centre : elle s’installe durablement dans les zones densément peuplées, et menace désormais le cœur du pouvoir militaire.
Washington tire la sonnette d’alarme
La réaction américaine ne s’est pas fait attendre. Dans un communiqué inhabituellement alarmiste, l’ambassade des États-Unis à Bamako a exhorté ses ressortissants à « quitter immédiatement le Mali par vol commercial », soulignant « l’imprévisibilité croissante de la situation sécuritaire ».
C’est une première. Même aux heures les plus sombres de la guerre du Nord, Washington n’avait pas adopté un ton aussi direct. L’ambassade a également prévenu ne plus être en mesure d’assurer la sécurité de ses ressortissants hors de la capitale, déconseillant tout déplacement par voie terrestre.
Les États-Unis ne se trompent pas : Bamako se trouve aujourd’hui dans une posture défensive. Les enlèvements de civils et d’étrangers se multiplient, à l’image du récent rapt de deux commerçants égyptiens à l’ouest de la ville. La capitale se transforme en forteresse assiégée, tandis que les routes, jadis artères économiques, deviennent des couloirs de danger.
Une crise régionale qui dépasse les frontières
Ce regain d’instabilité au Mali ne saurait être lu uniquement comme un épisode localisé. Il s’inscrit dans une dynamique régionale complexe où le vide sécuritaire, né des tensions internes, ouvre la voie à une reconfiguration des équilibres de pouvoir au Sahel.
Les groupes armés, profitant de la désorganisation des forces étatiques et des rivalités politiques, étendent leur influence dans les zones frontalières. Leurs actions visent désormais à contrôler non seulement les ressources, mais aussi les routes logistiques, essentielles pour la survie économique de tout le sud malien.
Cette progression du JNIM vers le centre et le sud n’est pas anodine : elle cherche à encercler la capitale et à couper le pays de ses principaux flux commerciaux. Pour les puissances régionales, cette situation représente un double défi — sécuritaire et humanitaire — dont les conséquences risquent de déborder bien au-delà du Mali.
Vers un nouvel équilibre sahélien
Dans ce contexte de fragmentation du Sahel, une constante demeure : seuls les États disposant d’une stabilité interne forte, d’une expérience éprouvée dans la lutte antiterroriste et d’un ancrage territorial solide peuvent espérer contenir la propagation de la menace.
Alors que certaines capitales semblent vaciller sous la pression conjuguée des groupes armés et de la défiance populaire, d’autres s’affirment en acteurs de résilience et de médiation, garants d’un ordre encore fragile.












