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L’échec diplomatique du Maroc sur le Sahara occidental officialisé à l’ONU

Nouvelle passe d’armes à l’ONU. Le Maroc a officiellement exprimé sa colère, dans une tentative à peine voilée de camoufler un revers diplomatique cuisant. Dans une lettre transmise au Conseil de sécurité, l’ambassadeur marocain Omar Hilale a dénoncé un passage du rapport annuel de l’instance onusienne, qu’il juge « tendancieux » concernant la question du Sahara occidental. Le texte en question, pourtant validé sans réserve dans les délais réglementaires, rappelle le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination — un principe que Rabat tente inlassablement d’écarter des discussions.

En effet, ce rapport, fruit d’un travail conjoint entre la Russie et le secrétariat général de l’ONU, retrace les activités du Conseil pour l’année 2024. Il a été adopté selon la procédure tacite : un silence équivalant à un accord. Or, jusqu’à l’échéance du 10 février 2025, aucun État membre n’a formulé d’objection. Ce n’est que plusieurs mois plus tard, en mai, que la Sierra Leone, appuyée par la France et les États-Unis, a tenté de contester a posteriori un paragraphe portant sur le Sahara occidental. Une tentative aussitôt désavouée par la Russie, la Chine et l’Algérie, qui ont rappelé que les règles onusiennes ne peuvent être redéfinies au gré des opportunités politiques.

Au cœur de la controverse : la réaffirmation explicite, dans le rapport, de la nécessité d’une solution politique « juste, durable et mutuellement acceptable », garantissant l’autodétermination des Sahraouis. Une ligne de conduite conforme aux résolutions antérieures, mais que Rabat perçoit comme une remise en cause directe de sa prétendue souveraineté sur le territoire.

Dans sa lettre, le Maroc ne se contente pas de critiquer le contenu : il accuse la Russie — rédacteur principal du rapport — de parti pris, et pointe du doigt l’Algérie, qu’il soupçonne d’avoir influencé le texte. Une posture défensive qui ne masque guère le sentiment d’isolement croissant du royaume sur la scène multilatérale. Rabat regrette aussi l’absence de référence à l’Algérie et à la Mauritanie comme parties prenantes, alors même qu’Alger s’est retirée du format des tables rondes en 2023, dénonçant une mascarade diplomatique.

Cette déconvenue intervient dans un contexte où le Maroc multiplie depuis des années les efforts bilatéraux pour imposer sa vision. Entre reconnaissance américaine du « Sahara marocain » sous Trump, partenariats économiques ciblés avec Londres et Paris, et normalisation avec l’entité sioniste, Rabat a investi dans une diplomatie transactionnelle ambitieuse. Mais au sein des enceintes multilatérales, cette approche montre ses limites. L’ONU reste sourde aux arrangements individuels tant que le principe d’autodétermination — pierre angulaire du droit international — n’est pas respecté.

Le principal grief formulé par Omar Hilale réside dans ce qu’il qualifie de « déséquilibre » du rapport, qui selon lui refléterait uniquement le point de vue de certains membres, en particulier la Russie et l’Algérie. Une affirmation contredite par les faits : le texte a fait l’objet de concertations préalables, et n’a rencontré aucune opposition au moment de son adoption. Le Maroc, en dénonçant aujourd’hui ce qu’il n’a pas contesté hier, tente de remodeler les règles du jeu après coup — une démarche largement perçue comme une tentative de détourner l’attention.

La tentative de réouverture du dossier par la Sierra Leone a surtout permis de réaffirmer l’alignement stratégique entre Alger, Moscou et Pékin. Lors de la séance du 30 mai, la Chine a rappelé avec fermeté que revenir sur une procédure de silence déjà achevée reviendrait à fragiliser l’ensemble de l’architecture juridique des Nations unies. Toute remise en question du processus multilatéral ferait, selon Pékin, voler en éclats le socle de confiance entre États membres.

Finalement, le Maroc se retrouve dans une position délicate : vouloir discréditer un rapport qu’il n’a jamais contesté dans les temps, tout en intensifiant son offensive médiatique pour faire oublier un nouvel échec diplomatique. Ce que Rabat n’a pas pu empêcher dans le silence des couloirs onusiens, il cherche désormais à renverser dans le bruit de la scène publique.

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